For my English-speaking readers, please go directly to this blog in which I introduce the idea of building a community-based participatory research project on Hive (also known as a citizen science project). For my French-speaking readers, please stay around and read further.
Après plusieurs semaines de tergiversations, j’ai finalement décidé de sauter le pas et de présenter une idée qui me trotte dans la tête depuis un moment. Il s’agit de la mise en place d’un projet de sciences citoyennes (ou projet de recherche de sciences participatives) sur Hive. Pour rappel, il s’agit d’un projet de recherche auquel des acteurs non-scientifiques (c’est-à-dire des membres de la communauté Hive) participent. Les différents échos étant positifs (tout comme les commentaires sur la version anglaise de ce post), il n’y avait plus aucune raison d’hésiter.
Ainsi, je ne vous parlerai pas de sujets actuels de physique des particules ou de ma propre recherche aujourd’hui. En tous cas pas directement. En revanche, je vais introduire et détailler ce que j’ai en tête, convaincu que ça pourrait consister en un super précédent pour Hive (en plus d’être amusant).
Comme d’habitude, tout input à la discussion est bienvenu, tout comme toute réticence ou commentaire. Sur ce, je vous laisse ce post, et je vais aller profiter de mes deux jours à Lyon ! Les voyages professionnels reprennent petit à petit…
[Crédits: Maxwell Hamilton (CC BY 2.0)]
Pourquoi un tel projet sur Hive et pourquoi ça pourrait fonctionner ?
Mon désir de construire un projet de recherche de sciences participatives sur Hive ne date pas d’hier. Il y a 3 ans (je vous parle d’un temps que les plus jeunes d’entre nous ne peuvent pas connaître), j’ai tenté de mettre en place quelque chose de cette lignée dans le contexte d’Utopian. L’idée fut de concevoir un programme open source qui pourrait être utile pour les physiciens des particules. Tout avait bien démarré et 4-5 personnes étaient impliquées. Mais bon, ça a foiré assez rapidement. J’avais sous-estimé le facteur temps, malheureusement… Et ne parlons même pas du facteur ‘théorie des champs quantiques’, vu que nous ne nous sommes même pas rendus assez loin dans le projet pour que ce dernier soit pertinent…
Mais du coup, pourquoi retenter quelque chose maintenant ?
La raison est simple. Depuis 2019, pas mal d’eau a coulé sous les ponts. L’événement déclencheur fut les deux stagiaires de licence extrêmement motivés qui collaborent avec moi depuis janvier sur un projet de matière noire, à raison de quelques heures par semaine. Ces stagiaires ne connaissaient pas grand chose en physique des particules à leurs débuts, ni en théorie des champs quantiques (tant qu’à faire). En gros, leur niveau de connaissances en physique des particules était assez similaire à celui de tout un chacun (et donc des membres de la communauté Hive). Bien sûr, le projet de stage a été conçu en connaissance de cause.
[Crédits: geralt (pixabay)]
Après deux mois de travail acharné (mais seulement quelques heures par semaine, j’insiste), mes stagiaires ont commencé à produire des résultats intéressants. Ces résultats ont été obtenus par l’utilisation d’outils dédiés, mais sans que le fonctionnement interne de ces outils n’ait besoin d’être décortiqué (ainsi, pas besoin de la théorie des champs quantiques). En gros, ils ont réussi à contribuer à un projet scientifique sans aucune connaissance préalable sur le sujet du projet. Et ils ont même utilisé mon blog sur Hive comme source d’informations (je le mentionne car je trouve ce fait assez sympa).
Suite à cette surprise, la fameuse idée d’un projet de sciences citoyennes sur Hive a à nouveau germé en moi… Si cela a fonctionné pour mes deux étudiants, cela devrait pouvoir fonctionner sur Hive, pour autant qu’il y ait des participants avec quelques heures de temps libre par semaine,
Détails, attentes et prérequis
Dans mes posts récents, je me suis attaqué au sujet de la physique des neutrinos. Dans un premier article, j’ai ainsi fourni une introduction générale sur ce sujet. J’ai expliqué pourquoi nous savons aujourd’hui que les trois neutrinos du Modèle Standard sont massifs et se mélangent les un aux autres lors de leur propagation. Dans un second post, j’ai discuté de mes recherches et comment avec mes collaborateurs nous avons proposé d’étudier les masses et mélanges des neutrinos au Grand Collisionneur de Hadrons du CERN et à ses successeurs potentiels d’une façon innovante. En fait, ce qui est vraiment cool dans notre approche est que nous sondons les neutrinos sans neutrino.
Dans la publication scientifique associée, nous avons fourni une preuve que ce concept fonctionnait, en regardant un signal dans lequel soit deux muons soit deux antimuons étaient produits. Cependant, il existe d’autres canaux potentiellement super intéressants, comme ceux avec deux électrons, deux positrons, un muon et un électron, etc. Nous n’avons simplement pas eu le temps de tout étudier. Pour faire court, il existe de nombreuses variations du signal de départ, et nous ne savons pas le potentiel de découverte associé à chacune de ces variations. C’est ce que je propose de faire sur Hive, dans un contexte de projet de sciences citoyennes.
Dans ce projet, nous simulerons le signal correspondant aux signature de neutrinos considérées (deux électrons, deux positrons, etc.) ainsi que le bruit de fond du Modèle Standard. Ces simulations se basent sur des outils numériques fortement automatisés, de sorte qu’il n’est pas nécessaire de connaître grand chose en physique des particules pour s’en servir sur des ordinateurs du commerce. Ainsi, mon aîné a réussi à simuler la production de 10,000 bosons de Higgs quand il avait 6 ans, et ce sur mon laptop. Facile, non ?
Une fois la phase de simulation terminée, nous allons concevoir une analyse de physique permettant d’extraire le signal du bruit de fond du Modèle Standard. À nouveau, pas de panique. Il existe des outils automatiques très utiles pour cela, permettant d’accomplir cette tâche sans rien connaître en programmation (je n’ai pas encore écrit de post à ce sujet, mais ça va venir prochainement). N’est-ce pas merveilleux ?
Pour résumer, nous allons mettre en place une nouvelle étude des modèles de masse des neutrinos au Grand Collisionneur de Hadrons et ses potentiels successeurs. Cette étude comportera une phase de simulation des signaux et du bruit de fond et une phase de mise en place d’une analyse permettant de séparer correctement signal et bruit de fond.
[Crédits: KATRIN]
Les résultats obtenus ont vocation à être publiés dans une revue scientifique de première classe, avec comme auteurs tous les participants au projet. Cela permettra de démontrer de façon solide non seulement comment des acteurs non-scientifiques peuvent contribuer à de la recherche de premier plan en physique des particules, mais aussi comment l’écosystème Hive (et STEMsocial en particulier) peut fournir un cadre pertinent pour un projet de sciences citoyennes. Bien sûr, la route est longue avant d’en arriver là…
Ce projet requiert un investissement en temps important de ma part (tout comme lorsque je décide de superviser un étudiant). Mais ma motivation est au plus haut grâce à l’impact potentiel et le fun qui émergera de notre travail. Je rappelle que j’ai rejoint Hive avec un but initial d’y trouver un endroit où partager des informations et ma connaissance de la physique des particules avec le grand public. Ce projet s’insère parfaitement là-dedans.
J’espère que les participants partageront leurs progrès avec la communauté STEMsocial, qui supportera leur implication du mieux possible. On pourra ainsi utiliser Hive comme une sorte de ‘cahier de laboratoire’.
Finalement, les prérequis sont minimaux : du temps (quelques heures par semaine) et un ordinateur pas trop vieux. Pour le reste, il faudra simplement compter sur moi.
[Crédits: CERN]
La version courte… un projet de sciences citoyennes sur Hive
Dans ce blog (posté depuis le TGV vers Lyon), j’ai donné des détails concrets à propos d’une idée (folle ?) d’un projet de sciences citoyennes sur Hive. Ce projet sera organisé avec la participation de membres de la communauté et mènera, espérons-le, à la publication de nouveaux résultats de physique des particules dans quelques mois. Je propose d’étudier les modèles de masse des neutrinos aux collisionneurs de particules au travers de simulation de plusieurs nouveaux signaux, que nous comparerons aux attentes des bruits de fond du Modèle Standard correspondants. Ensuite, nous analyserons tout cela afin de pouvoir déterminer la sensibilité des machines présentes et futures à de tels signaux.
Plus tôt dans l’année, deux étudiants de licence avec peu de connaissances en physique des particules (d’un niveau donc similaire à celui de quasi tout utilisateur sur Hive) ont montré que des résultats intéressants pouvaient être obtenus en quelques mois. Du coup, pourquoi ne pas tester tout cela sur Hive ? Je suis assez convaincu qu’un projet de sciences citoyennes sur Hive a une chance de succès, et que ses résultats pourraient être finalement publiés dans une revue scientifique. Cela offrirait au passage un précédent intéressant pour tout l’écosystème Hive. Bon après c’est mon avis qui est tout sauf objectif…
Évidemment, avant le rêve, il faudrait démarrer le projet. Cela devrait arriver très prochainement. Si cela vous intéresse, n’hésitez pas à vous signaler dans les commentaires de ce blog. Je répondrai aussi du mieux possible à toute question éventuelle.
Je vous souhaite à toutes et tous une bonne fin de semaine.